Arrivée d'Antoinette

Antoinette se dirigeait vers le château de Féternes.
La jeune femme aux boucles rousses peinait et grimaçait sous le poids d’un gros sac de voyage.
Ses escarpins un peu trop étroits lui faisaient mal, sa robe d’un vermillon éclatant se ternissait de poussière et c’est, toute rouge et essoufflée qu’elle arriva aux portes du domaine.
Elle hésita à sonner la grosse cloche du portail, se doutant bien que sa présence en ces lieux ne serait pas forcément la bienvenue.
En effet, Antoinette avait tout à craindre des foudres de sa mère à son égard. Cette dernière, Hermione, travaillait au château depuis bien longtemps et n’avait jamais cherché à la faire embaucher en ces murs.

Très jeune, Antoinette avait fui le joug maternel, traînant dans les rues du village et cherchant la compagnie des hommes. Malheureusement pour elle, la rousse piquante ne s’attira que l’attention des rustres et se retrouva enceinte à l’âge de 16 ans.
Elle revint vivre chez sa mère mais ne supportant pas les reproches continuels de sa mère, elle abandonna la petite Manon et retourna à ses amours tumultueuses.
Le dernier homme chez lequel elle vivait depuis quelques mois, venait de la mettre à la porte et Antoinette se retrouva à nouveau sans domicile.

C’est ainsi qu’elle pensa à sa mère et à la petite Manon qu’elle n’avait pas vue depuis bien longtemps.
Ce n’est pas qu’elle était enchantée de les retrouver mais elle n’avait guère le choix.
Après avoir essuyé son front brillant et épousseter sa robe, elle fit sonner la cloche.

La cloche résonna dans le château tranquille. Lucas arriva à grandes enjambées en marmonant.

- qui peut bien venir ennuyer le Seigneur Dufric à cette heure.

Il poussa le loquet et ouvrit la lourde porte en chène. Il vit d'abord une paire d'escarpins bon marché mais qui se voulaient..voyants..tout comme la robe qui..Il soupira devinant qui se trouvait dans tout ce tralala

- Antoinette que faites vous là ? je ne pense pas que vous soyez la bienvenue dans cette demeure, ni votre Mère, ni votre..enfin ..ne seraient heureuses de vous voir ici.

Il n'avait pas ouvert entièrement la porte que déjà elle l'avait poussé fortement et, telle une tornade, était passée.

Lucas soupira en murmurant..Pauvre de nous

Avant même que Lucas ait eu le temps de protester, la pimbêche passa devant lui et pénétra dans le hall d'entrée en poussant un rire sonore.

AAhh je vois que le Seigneur Dufric a conservé son molosse favori ! Je file à la cuisine voir ma mère...

Puis, elle revint sur ses pas et s'approcha du Cerbère en question et d'un geste impudique, mouilla son index d'un coup de langue et le posa sur les lèvres de Lucas.

Pas un mot de ma présence ici aux maîtres, compris ?

La mine renfrognée, Lucas chassa le doigt humide de l'impudente et grogna :

Tâche de n' pas embêter c'te pauvre Hermione, l'Antoinette, c'est tout ce que j'te demande..et on verra bien.

D'une pirouette qui fit voler sa robe bien trop voyante, la jeune fille hardie lui tourna le dos et se dirigea vers les communs où elle était sûre de trouver sa mère.